Là Où Deux Mondes se Touchent

Il y a une impression étrange dans l’air, quelque chose qui traverse les journées comme une ligne invisible. Pour certains, ce n’est pas un simple changement : c’est un bouleversement entier. Ça secoue les relations, ça bouscule la santé, ça ouvre des angles qu’ils n’avaient jamais vus. Ça arrive en vagues puissantes, parfois avec des douleurs, parfois avec des pertes, parfois avec une intensité presque impossible à expliquer.

 Et pendant que leur vie tremble, d’autres avancent sans ressentir ces secousses-là. Pas par ignorance, pas par fermeture, mais parce que leur rôle n’est pas de traverser cette zone du même côté. Eux, ils tiennent l’ancien, ils le maintiennent debout, pas pour le garder en place, mais pour que ceux qui traversent puissent faire le passage sans que le monde entier s’effondre en même temps.

 C’est là qu’apparaît ce qu’on appelle le Pont.

Il n’est pas fait de pierre ni de symboles. Il n’est pas visible dans le ciel. Il se construit entre les êtres. Il relie ceux qui voient venir l’autre rive et ceux qui ancrent encore la première. Il n’y a pas de supériorité dans ce partage : il y a deux rives, un passage, et chacun est placé là où il est le plus utile pour l’ensemble.

 Certains vivent le pont dans leur corps, à travers des vibrations, des pulsations, des mouvements internes qui ne ressemblent à rien de connu. Pour eux, ce n’est pas un frémissement subtil. C’est parfois violent, comme si la structure intérieure se réorganisait d’un seul coup. Le système nerveux prend tout. La peau réagit. Les pensées changent de direction. Le cœur accélère, puis ralentit, puis recommence. C’est un terrain de reconstruction, et il n’y a rien de “léger” à traverser là-dedans.

 Ce sont ceux-là qui avancent sur le pont en premier.

 Ils sentent les plaques bouger sous leurs pieds, ils sentent le souffle du changement passer dans leur colonne, dans leurs nuits, dans leurs décisions. Leur vie entière se recompose, parfois sans avertissement. Ils ne le font pas parce qu’ils l’ont choisi. Ils le font parce que c’est ce que leur être demande, à cet instant précis de l’histoire humaine.

 Et puis il y a les autres — ceux qui ne sentent pas tout ceci dans leur chair. Ils ne vibrent pas, ils ne tremblent pas, ils ne se questionnent pas autant. Mais leur rôle est immense. S’ils lâchaient tout, s’ils décrochaient, s’ils abandonnaient leur place, la première rive s’écroulerait. Il n’y aurait plus d’appui. Plus de continuité. Plus de stabilité.

 Ils sont les gardiens de l’ancien rivage. Les porteurs de l’équilibre. Ceux qui assurent la cohérence pendant le passage.

 Sans eux, ceux qui traversent seraient projetés trop loin, trop vite.

 C’est comme dans toutes les grandes transitions de l’humanité : il y a toujours eu des éclaireurs et des gardiens. Les éclaireurs voient la nouvelle lumière, mais les gardiens tiennent la torche qui empêche la nuit totale. L’un ne peut pas exister sans l’autre.

Ce pont que l’on traverse maintenant n’est pas seulement personnel. Il est collectif. Il n’appartient à aucune croyance, aucune culture, aucun langage. C’est un mouvement du vivant, une bascule lente, profonde, qui touche autant les corps que les systèmes, autant les individus que les sociétés.

Ceux qui traversent ressentent parfois le poids du chaos. Ceux qui tiennent ressentent parfois le poids de la responsabilité.

Et pourtant, tout avance ensemble.

 Le pont n’est pas une séparation. C’est une continuité. Une respiration à deux côtés.

On ne demande pas à tout le monde de marcher au même rythme. On ne demande pas à tout le monde de ressentir la même chose. On ne demande pas à tout le monde de comprendre ce qui se passe.

On demande seulement à chacun d’être à son juste endroit.

Ceux qui avancent, avancent. Ceux qui tiennent, tiennent. Ceux qui observent, observent.

 Et tous servent la même transition.

Le monde ne change pas en silence, mais il change avec douceur quand chaque rôle est respecté. Chacun participe au passage, que ce soit par secousses, par stabilité ou par observation. Le pont se construit ainsi : pas par bloc, pas par force, pas par croyance… mais par la justesse de la place que chacun occupe.

Comme je le dit toujours nous sommes tous des poussières d'ÉTOILE .

boutiqueshaman.com

Laisser un commentaire

Veuillez noter que les commentaires doivent être approuvés avant d'être publiés


<